Acidification des océans: l’inquiétant battement d’aile du papillon des mers (in French)

PARIS – C’est une sorte d’escargot marin connu sous le nom de papillon des mers: des chercheurs viennent de montrer que sa coquille est dissoute par l’acidification des océans, un constat qui pourrait avoir de grandes conséquences, car ce petit mollusque est une espèce clé de l’écosystème.

Le gaz carbonique (CO2) émis par les activités humaines influe non seulement sur le changement climatique, mais aussi sur la chimie des océans. Les océans absorbent plus du quart du CO2 rejeté par l’homme et ce C02 se dissout dans l’eau pour former de l’acide carbonique, abaissant son pH. Un processus appelé acidification des océans.

Depuis le début de l’ère industrielle, les océans de la planète sont devenus 30% plus acides. Le phénomène alarme les scientifiques, un certain nombre d’expériences en laboratoire ayant démontré son effet potentiel sur les organismes marins.

Une étude coordonnée par le centre de recherche britannique sur l’Antarctique (British Antarctic Survey), publiée dimanche dans Nature Geoscience, vient confirmer ces craintes, avec des effets constatés sur une espèce d’escargot de mer de la famille des ptéropodes (Limacina helicina antarctica).

Ce petit mollusque est doté de deux appendices en forme d’ailes, d’où son surnom de papillon des mers.

Lors d’une campagne d’exploration scientifique en 2008 dans l’Océan Austral, les chercheurs ont réalisé des prélèvements dans la mer de Scotia, une région caractérisée par des remontées d’eau froide depuis les profondeurs.

Ces eaux sont naturellement plus corrosives pour un minéral de la famille des carbonates de calcium, l’aragonite, utilisé par les ptéropodes pour fabriquer leur coquille.

Effet papillon ?

Normalement, l’eau de mer devient plus corrosive pour l’aragonite à une certaine profondeur, environ 1.000 m. Cependant, sur l’un des sites d’échantillonnage, les chercheurs ont montré que, sous l’influence supplémentaire de l’acidification des océans, ce seuil était atteint dès 200 m de profondeur, là où vivent les escargots des mers.

Les propriétés corrosives de l’eau provoquent une sérieuse dissolution de la coquille des ptéropodes vivants, démontrant combien ils sont vulnérables, indique l’auteur principale de l’étude, Nina Bednarsek.

L’acidification des océans, résultant des rejets de dioxyde de carbone causés par l’homme, a contribué à cette dissolution, poursuit-elle.

Les ptéropodes sont une source de nourriture importante pour les poissons et les oiseaux ainsi qu’un bon indicateur de la santé de l’écosystème, souligne un de ses collègues, Geraint Tarling. Si la dissolution de leur coquille ne va pas nécessairement provoquer leur mort, elle peut accroître leur vulnérabilité aux prédateurs et aux infections et par conséquent avoir un impact sur d’autres maillons de la chaîne alimentaire, ajoute-t-il.

La coquille du ptéropode contribue en outre indirectement à freiner le changement climatique, car elle lui permet de couler quand il meurt, emportant avec lui le CO2 ingéré au cours de son existence et aidant ainsi les océans à absorber de nouvelles quantités de CO2 à leur surface.

Dans un éditorial accompagnant l’étude, Justin Ries (Université de Caroline du Nord, Etats-Unis), jouant sur le nom familier du papillon des mers, évoque le célèbre effet papillon décrit par le météorologue Edward Lorenz. L’étude suggère que le double impact de l’acidification des océans et du réchauffement climatique rendent le battement d’aile plus inquiétant de jour en jour, dit-il.

AFP

Le Figaro, 26 November 2012. Article.


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